
La veille de quitter son poste à Matignon, Manuel Valls met fin à la séparation des pouvoirs et à la souveraineté populaire du peuple français.
Valls parachève la tendance de ces dernières décennies et décrète officiellement la dictature en France. Après que le gouvernement se soit progressivement accaparé le pouvoir législatif, c’est au tour du pouvoir judiciaire d’être sous contrôle.
Le pouvoir exécutif légifère
Le pouvoir exécutif dispose de deux façons de légiférer, en lieu et place du pouvoir législatif dont c’est le rôle. Le recours à l’article 49-3 de la Constitution et les ordonnances.
L’article 49, alinéa 3 de la Constitution
Par le recours à l’article 49-3, le Premier ministre, après délibération du Conseil des ministres, engage la responsabilité du gouvernement sur un projet de loi en débat à l’Assemblée. Cette décision entraîne la suspension immédiate de la discussion du projet de loi. Le projet est considéré comme adopté, sans être soumis au vote, sauf si une motion de censure est déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent et si elle est votée selon des conditions très précises : seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure qui ne peut être adoptée qu’à la majorité des membres composant l’Assemblée.
Ainsi, la loi de destruction du code du travail issu du programme du Conseil National de la Résistance (CNR), dite loi « El Khomri », du nom de l’ectoplasme ministériel chargé de la signer, ainsi que la loi de démantèlement de nos services publics, dite loi « Macron » du nom d’un autre ectoplasme, ont été adoptées par la procédure du 49-3.
Notons que quand des motions de censure sont déposées, elles ne sont que des « coups médiatiques ». D’une part, ces motions sont déposées généralement par l’opposition parlementaire minoritaire, d’autre part, elles peuvent mener à la dissolution de l’Assemblée, ce qui calme les ardeurs des privilégiés qui y siègent.
Enfin, quand le gouvernement utilise le 49-3, la médiatisation qui s’ensuit dévoile son autoritarisme, donc sa faiblesse. Ainsi, il est plus facile, moins voyant, plus sournois, de recourir aux ordonnances.
Qu’est-ce qu’une ordonnance ?
En droit constitutionnel français, une ordonnance est une mesure prise par le gouvernement dans des matières relevant normalement du domaine de la loi, en vertu de l’article 38 de la Constitution. Elle relève de la procédure législative déléguée. Or le gouvernement ne peut prendre des ordonnances que s’il y a été habilité par le Parlement, conformément à l’article 38 de la Constitution, grâce à une loi d’habilitation.
Assimilées à des règlements, les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication. Elles ne prennent toutefois valeur législative qu’après avoir été ratifiées par le Parlement dans un délai fixé. La procédure des ordonnances prolonge la pratique des décrets-lois des IIIe et IVe République et reprend le principe de l’autorité législative exclusive des rois de France sous l’Ancien Régime.
Combien d’ordonnances ?
Selon un rapport du Sénat datant de février 2014, entre 1984 et 2003, chaque année en moyenne 1,5 lois d’habilitation ont été promulguées, 8 ordonnances ont été publiées dont 5 ratifiées. Entre 2004 et 2013, chaque année en moyenne 10 lois d’habilitation ont été promulguées, 36 ordonnances ont été publiées dont 30 ratifiées.
La tendance est donc clairement dessinée : les lois en France sont de plus en plus souvent adoptées de façon autoritaire par le pouvoir exécutif. L’Assemblée nationale est devenue une simple chambre d’enregistrement.
Le pouvoir exécutif contrôle le pouvoir judiciaire
La veille de quitter son poste de Premier ministre, Valls, par un simple décret, a placé en catimini la plus haute autorité judiciaire sous le contrôle du gouvernement. Les membres de la Cour de cassation l’ont appris en lisant la Journal Officiel. Très concrètement, ce décret confie à l’Inspection générale des services judiciaires, une autorité sous les ordres du gouvernement, le contrôle de la Cour de cassation. Si celle-ci était déjà contrôlée par la Cour des comptes ou le Conseil de la magistrature, ces deux institutions sont néanmoins indépendantes – ce qui n’est pas le cas de l’Inspection générale des services judiciaires.
Ainsi, en l’espace de quelques années, le principe de séparation des pouvoirs, énoncé par John Locke dans son « Second traité du Gouvernement Civil »de 1690 et plus tard par Montesquieu dans « L’esprit des lois » (1748) est foulé aux pieds. Rappelons à cet égard l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution. »
La logique européiste de nature fasciste
Si nous étions en démocratie, c’est-à-dire un peuple souverain, nous pourrions nous offusquer de ces mesures de nature fasciste. Mais nous savons que l’article 17 du TUE institue la Commission européenne en tant que dictateur de l’UE et que l’article 121 du TFUE organise la mainmise de l’UE sur les politiques économiques de États membre. Nous savons par ailleurs que plus de 80 % des lois françaises qui ont un impact sur nos vies ne sont que la transcription des directives européennes en droit français. En somme, nous savons que l’UE est une dictature.
Finalement, Valls n’a fait que clarifier les choses. La dictature européiste dégouline maintenant jusque dans nos institutions. En toute logique, il fallait que celles-ci ne puissent plus offrir de possibilité de s’opposer, voir simplement de critiquer cette dictature puisque maintenant elle en est une autre.
Plus une personne sensée ne peut affirmer aujourd’hui que nous sommes en démocratie. Il est grandement temps, comme je l’explique dans mon livre, que la France se relève.
Régis Chamagne