Covid-19, conséquences au second degré

Nous entrevoyons les effets induits par la pandémie du Covid-19, mais il en est un que l’on n’a pas encore anticipé car c’est un effet induit au second degré. Je voudrais l’aborder dans ce court article.

Notre argent est confiné

Tout commence par une réflexion de Charles Sannat dont je reprends plusieurs éléments dans le paragraphe qui suit. En effet, puisque nous sommes confinés, que nos achats sont limités au strict nécessaire, essentiellement l’alimentation, que de surcroît les chaînes logistiques sont rompues, notre argent ne nous sert plus à grand-chose. Nous ne pouvons plus rien acheter ni vendre en dehors des éléments de première nécessité.

Ça pourrait durer longtemps

Quelques indices sont inquiétants :

  • Les guéris retombent malade, ce qui suggère que l’immunité provoquée par la contamination à ce virus pourrait être très faible ; elle ne durerait que quelques semaines seulement. Cela signifie qu’un État ne peut pas compter sur l’immunité de sa population à moyen et long terme pour faire retomber durablement les effets du virus. D’ailleurs, en ce moment, le nombre de cas repart à la hausse en Chine.

  • De plus, il semblerait que l’on soit plus fragile à la deuxième infection qu’à la première. Les études n’en sont qu’à leur début, mais si tout ceci est avéré, cela indiquerait que nous sommes entrés dans une crise durable.

Encore une fois, les études n’en sont qu’à leur début, donc rien n’est certain mais tout est probable. Ainsi, la probabilité que l’on assiste à une succession de pics de contamination dans chaque pays est non nulle. Cela pourrait engendrer une sorte de yo-yo entre l’offre et la demande dans l’économie mondiale, puisque la Chine est l’usine du monde. Quand la Chine se met en quarantaine, l’offre se tarit tandis que les pays clients occidentaux sont en demande. Puis la Chine maîtrise sa situation et peut se remettre à produire et exporter, mais au moment où ses clients sont à leur tour en quarantaine. Mais l’épidémie repart en Chine qui tarit de nouveau l’offre, etc.

Le seul événement qui pourrait faire sortir le monde de ce yo-yo est la mise au point d’un ou de plusieurs traitements efficaces. Il n’est d’ailleurs pas certain qu’un vaccin soit la meilleure solution, si effectivement l’immunité de ce virus était très faible.

En conséquence, nous nous trouvons devant la possibilité d’un arrêt durable de l’économie mondiale.

La trésorerie des grandes entreprises

Dans ce contexte de l’arrêt de l’économie mondiale, les grandes entreprises vont faire face à un problème de trésorerie, puisqu’elles ne pourront plus vendre leurs produits. Déjà, Airbus a décidé de ne pas verser les dividendes de 2019 et 2020 pour préserver, autant que faire ce peu, sa trésorerie, et atténuer l’effet de la crise.

Répercussions au second degré

Poussons le raisonnement plus loin. Si les grandes firmes ne peuvent plus vendre leurs voitures, leurs produits de luxe, leurs téléphones portables ni tous leurs objets à obsolescence programmée, elles vont devoir rogner sur toutes leurs dépenses inutiles et anachroniques. En particulier, pourquoi continuer à faire de la publicité pour des voitures que l’on ne peut plus vendre, pour des montres de luxe que l’on ne peut plus écouler… ? Pourquoi dépenser tout cet argent en communication anachronique ? Car si les médias demeurent irremplaçables pour aller chercher le consommateur, que se passe-t-il quand il n’y a plus de consommateur ?

Je me marre

Aujourd’hui, les médias vivent largement de la publicité. Il y a trois types de média :

  • Les médias publics tirent leurs ressources, environ, pour un tiers de la publicité et pour deux tiers des subventions publiques.

  • Les médias privés payant tirent la plus grande partie de leurs ressources de leurs abonnés et le reste, variable mais relativement faible, de la publicité.

  • Enfin, les médias privés non payant tirent la totalité de leurs ressources de la publicité.

Alors, quand l’argent de la publicité se tarira, que se passera-t-il ?

  • Les médias publics pourront, soit réduire leur voilure, soit compenser leurs ressources par des subventions publiques, soit un mina-mina entre les deux.
  • Les médias privés payant auront de petits ajustements à faire.
  • Les médias privés non payant disparaîtront ou devront être financés directement par les milliardaires qui les possèdent. Sauf que les milliardaires en question, qui tirent leurs fortunes de l’économie mondialisée, seront bien en peine. So what ?

En conclusion, tous ces bellâtres nombrilistes qui nous serinent les bienfaits de la mondialisation depuis tant et tant d’années, risquent de se retrouver au chômage, par les effets en cascade des conséquences de la mondialisation. Grand bien leur fasse et nous fasse. Nous pouvons leur souhaiter une chose : qu’ils reprennent le cerveau qu’ils ont mis au placard à l’entrée de leurs médias et s’en servent librement et utilement. Ça fera du bien à tout le monde, à commencer par eux.

Régis Chamagne